rbx, Avril 2017
"E., elle rêve sa vie plus qu'elle ne la construit..."
Ainsi débutait la signification de ce prénom dans le livre de notre enfance. Déjà la dualité et quelle dualité ! Rêverie et construction.
Comment vivre quand on se sent double et sans cesse tirailler : suis-je ici ou suis-je là ?
Et puis il y a une histoire d'amour, une histoire d'amour pour une ville. Y revenir.
Peut-être était-ce important d'y revenir, pour la quitter mieux que la première fois.
"Par deux fois, Roubaix m'a donnée ma liberté, je sais désormais la quitter."
C'est ce que je me suis dit un samedi matin courant décembre 2016.
Mais je n'ai pas su partir, et je me suis dit que ce n'était pas le bon moment. Toujours laisser le temps faire son oeuvre.
Alors nous avons continué à vivre à Roubaix, tantôt seule, tantôt à quatre.
J'y aime d'aller à la danse le mercredi soir.
J'y aime de prendre des photos de la vie des enfants, de la ville et de ses paysages.
J'y aime souvent d'avoir les enfants "rien que pour moi" parce qu'on arrive à bien à mettre nos rythmes en symbiose, peut-être parce qu'il n'y a pas d'écran. On a remplacé les "histoires du soir" par des "massages du soir" et c'est tout autant agréable. Quitte à se coucher un peu trop tard parfois...
Mais c'est pour mieux profiter de mes heures de rêveries nocturnes où je les entends respirer et soupirer d'aise.
J'y aime mes rêveries matinales aussi.
Chaque lever du jour rend les murs flamboyants du jeu d'ombres et de lumières créé par le soleil à travers le verre. Parfois aussi j'entends la poule dans le jardin d'à côté qui caquète ou je profite d'un merle qui chante perché sur la branche morte qui domine un arbre. Ce sont des instants sublimes.
J'y aime que ce soit plus petit et qu'il n'y ait pas beaucoup d'objets.
En fait pour tout vous dire c'est vraiment loin d'être petit ici, c'est même très vaste en fait.
Et malgré tout, je sais qu'il manque une dimension.
Je vous ai parlé de la "lettre d'aspiration" que je voulais rédiger.
Elle se construit petit à petit : aspirer à habiter mon âme, aspirer à habiter mon corps, aspirer à habiter mon esprit.
Conquêtes et reconquêtes.
Deux aspirations ont retrouvé de l'équilibre. Un équilibre parfois fragile, mais peut-être est-il simplement joueur car aussitôt je pense le tenir pleinement, il s'échappe pour voir comment je vais réussir à le reprendre.
Mais peut-on ne vivre que d'amour et d'eau fraîche ?
Alors je sens qu'aujourd'hui c'est important de chercher à aspirer à habiter mon esprit.
Construire alors ?
Dans un premier temps, reconstruire doucement à Fives, l'été à 5.
Ensemble tout en restant vigilant pour ne pas se prendre un pied dans le tapis.
Pas après pas donc quitte à s'arrêter parfois pour veiller à respecter les aspirations de chacun...
L'équilibre reste la clé.
Et puis ce matin, par la voix du Courrier International, j'ai reçu le consentement mon bon rOb.
Et je me suis sentie enfin définitivement soulagée de ma décision et du courrier parti en début de semaine à l'attention de mon propriétaire.
Relief, mot préféré autant en français qu'en anglais.
Un déménagement est prévu pour la fin du mois du mai.
27 avril au 3 mai 2017 //
"Tu seras toujours mon plus beau fantasme", m'a un jour susurré à l'oreille une merveilleuse et impossible amante. C'était il y a bien longtemps. Nous venions de renoncer à tout plaquer et à aller nous marier à Angkor Vat, au Cambodge, pour passer les dix années suivantes à accompagner des voyageurs dans des escapades exotiques sur les grands sites sacrés du monde. Cette phrase marqua un moment poignant mais libérateur. Elle nous a permis de reprendre chacun de notre côté le cours de notre vie et de poursuivre d'autres rêves, plus réalistes et plus fructueux. Je t'invite à amorcer très bientôt une semblable délivrance, Sagittaire.
"(...) Toi qui marche, il n'existe pas de chemin.
Le chemin se fait en marchant. (...)" Antonio Machado
"(...) Aller me suffit.
J'ai rapporté du désespoir un panier si petit qu'on a pu le tresser en osier." René Char
Je pleure, c'est l'émotion. Ca n'était pas arrivé depuis l'été dernier.
Aller me suffit, sacré René Char, sacré rOb...
Je vous embrasse fort,
E.
Aspirations, Correspondance à C. & M., P., A., C., G., C. & T, Fri, 28 Apr 2017 01:58